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Et c’est bête.
samedi 28 février 2009 / 13 mai 2009, par
Voir en ligne : Framablog - La loi Création et Internet, le chant du cygne et le maquis
À partir d’un constat en grande partie correct, on a préparé un projet de loi mensonger, liberticide, techniquement et juridiquement mal pensé ; il sera probablement voté, comme le fut en son temps la loi DADVSI, inappliquée parce qu’inapplicable (et imprononçable). On ne s’en étonnera pas, Christine Albanel s’y engage avec obstination.
La France invente le Minitel pour la seconde fois…
Préparons-nous : il faut dès maintenant populariser les outils de contournement (j’ai testé, ça fonctionne), et s’en servir dès la promulgation de cette mauvaise loi, pour faire très vite la preuve de son inefficacité (ce n’est vraiment pas difficile). Accessoirement, ça réduira la fracture entre ceux qui savent et seront à l’abri, et ceux qui ne savent pas et se feront piéger.
D’autres informations sur free.korben.info.
(Allez donc me localiser dans cet écheveau…)
Un proxy d’anonymisation à l’épreuve d’Hadopi a été installé sur le présent site [2].
Une autre parade imparable ici.
Quant à l’argument classique consistant à dire que ces outils sont des pousse-au-crime, la réponse est évidente : les cybercriminels n’ont nullement besoin de ça pour nuire, ils l’ont démontré bien avant l’apparition de ces moyens de défense des libertés individuelles. Et rappelons cette maxime de Philip Zimmermann : “If privacy is outlawed, only outlaws will have privacy” (“Si la vie privée est mise hors la loi, seuls les hors-la-loi auront une vie privée”). S’il y a un pousse-au-crime dans ce dossier, c’est le projet de loi « Internet & Création » : son effet le plus évident sera une généralisation de la clandestinité internétique, en vertu du principe « on me surveille pour me piéger, donc je me cache ». C’est l’un des aspects les plus malsains de cette loi.
Il y en a un autre, plus pernicieux encore, qui justifie et renforce ce qui vient d’être dit : à travers ce projet de loi, le gouvernement français entend obtenir les moyens d’abord techniques, et sans doute juridiques dans un second temps, d’une surveillance et d’un filtrage de tout le trafic internet [3]. Vu l’évidente inefficacité du projet comme instrument de prévention ou de répression de la vraie cyberdélinquance, tout se passe comme si l’objectif premier de l’opération était de rendre possible une surveillance d’État, la répression de la piraterie n’étant alors qu’un rideau de fumée ou un prétexte [4]. Le projet n’est d’ailleurs assorti d’aucune garantie de neutralité pour l’internaute de bonne foi, puisque seuls les délinquants sont officiellement visés [5].
Hadopi, abusivement présenté comme une action de politique culturelle, est de toute évidence une opération relevant davantage de la place Beauvau que de la rue de Valois. Le Ministère de Mme Albanel n’est qu’un paravent, assez transparent d’ailleurs. Le dispositif sera ensuite utilisé à d’autres fins : c’est la première étape d’un processus plus cohérent qu’il y paraît, dont on fera astucieusement supporter le coût par les internautes.
Le risque est donc réel d’une situation orwellienne où une officine gouvernementale verra tout ce que vous faites et déterminera dans la plus totale opacité ce qui pourra et ce qui ne pourra pas parvenir jusqu’à votre ordinateur. Une façon comme une autre d’anticiper la mutation numérique de la diffusion de l’information, et de la contrôler bien plus efficacement que ne peut l’être la presse écrite. Vu comme ça, le projet n’est plus du tout absurde et les faiblesses de Mme Albanel dans sa défense du projet apparaissent de bien peu d’importance [6]… Deux choses sont à espérer : (i) que les organes de presse se dotent d’accès non filtrables et surveillent avec vigilance la censure du Net « ordinaire », (ii) que la manœuvre échoue sur le plan technique.
Deux petites leçons de choses de Tristan Nitot, à l’intention de Christine Albanel et de son cabinet :
1. Standblog - Filtrage d’Internet : la grande illusion (partie 1/2), la volumétrie
C’est expliqué avec simplicité et pertinence, mais je doute fort que même après en avoir pris connaissance, et même si la leçon est comprise, la ministresse et ses conseillers corrigent leur tir. Tout indique en effet qu’au-delà d’une évidente incompétence, il y a autre chose. Au mieux, un entêtement irrationnel dicté par une obsession du fliquage (fût-il inopérant), au pire une allégeance inavouée à certains intérêts commerciaux, du reste mal compris.
Au bout du compte, j’ai presque envie de voir cette loi votée et promulguée. Telle quelle, elle est en effet promise à un ratage inéluctable, sans compter les bien enquiquinantes suites judiciaires, politiques et européennes qui ne manqueront pas de se produire. Mais on connaît la méthode UMP : montrer les dents, brandir un épouvantail, et ensuite faire marche arrière en essayant de conserver un petit quelque chose.
Ce qui va ruiner cette stratégie, c’est que la réalité du web dépasse l’entendement des dinosaures qui nous ont pondu cette ânerie (le débat à l’Assemblée Nationale est éclairant à ce propos). Encapsulation, routage en oignon, anonymisation, maquillage, stéganographie, VSAT, sont des outils efficaces et d’accès aisé, qui feront de cette loi un vestige avant même qu’elle soit votée. La liberté de l’internaute français survivra donc, moyennant un peu d’astuce : il va se comporter comme ses cousins iraniens ou nord-coréens.
La musique enregistrée que je détiens (environ 500 disques) a été acquise légalement et à grands frais (hep, les maisons de disques, merci qui ?). J’écoute aussi beaucoup la radio, le plus souvent par internet, je podcaste comme tout le monde. Quelquefois, j’en profite pour enregistrer, tout comme je le faisais déjà, adolescent, sur des cassettes ou des bandes magnétiques analogiques, que je possède toujours (souvenez-vous de Jean-Christophe Averty hurlant « à vos cassettes ! »). Personne ne songeait, à l’époque, à qualifier cela d’acte de piraterie. Aujourd’hui, sous prétexte que la technologie a évolué de l’analogique [7] au numérique, mes enregistrements sont considérés comme des délits. Je réfute cette accusation, de même que j’ai la conscience parfaitement tranquille lorsque je prête ou emprunte un livre, un journal, un disque. [8]
Les vrais cyberdélinquants, les trafiquants à grande échelle, les pédopornophiles, doivent être combattus, mais autrement. Le dispositif hadopi n’est d’aucune utilité contre eux : ils disposent de toute la panoplie nécessaire pour s’en ficher royalement ; ils s’en réjouiront même, car cela fera diversion.
Enfin, il faut « anéfé » traiter la question de la juste rémunération de la création artistique distribuée sur le web ; là non plus, ce projet n’est pas pertinent. Il amalgame les (prétendus) intérêts des artistes et des éditeurs, il se trompe de cible en visant le toxicomane et non le dealer, ne combat pas le trafic organisé des œuvres artistiques, il ne favorise pas le développement d’une offre légale et attrayante. Il ne favorise pas la nécessaire évolution de l’industrie du disque vers une meilleure compréhension des réalités contemporaines. Il n’innove pas : il tente un acharnement thérapeutique dérisoire pour des industriels séniles et moribonds. Il ne fait qu’accompagner leur suicide collectif et ne retardera que très peu leur inéluctable disparition et l’avènement de leurs successeurs modernes.
Il était possible, et les nombreux amendements rejetés l’ont montré [9], de construire un cadre légal efficace, praticable, constitutionnellement et démocratiquement acceptable. L’entêtement des promoteurs du projet et le suivisme godillot des députés de la majorité ne l’ont pas permis. Légiférer efficacement en cette matière exige un niveau de compétence élevé dont on est encore très loin à la rue de Valois et à l’UMP. Il est 22 heures 47, la messe est (mal) dite. Dommage.
Vu d’Europe, ce feuilleton consternant apporte tout de même quelques enseignements : (i) on ne règlera le problème convenablement qu’à l’échelle européenne et dans le respect du cadre légal de l’Union [10], (ii) l’étude technique doit être solide et menée avec les acteurs de l’internet, (iii) les internautes ne doivent pas être traités avec condescendance ni assimilés a priori à des voleurs [11], (iv) les ministères compétents pour l’économie numérique doivent être associés à la conception du dispositif, voire la diriger, (v) les intérêts des artistes, ceux des sociétés de perception de droits et ceux des industriels du divertissement ne doivent pas être confondus, (vi) l’évolution nécessaire du modèle économique de la diffusion des biens culturels doit être encouragée et non contrecarrée, (vii) vouloir coupler le cadre légal de la distribution internétique des biens culturels avec la mise en place d’un dispositif policier de surveillance et de filtrage est illusoire : il s’agit ici de légiférer pour protéger les droits d’auteur, donc de compléter ou adapter, si nécessaire, un cadre juridique existant qu’il ne faut ni ignorer ni contredire.
Enfin, le vrai danger est une contamination de l’Europe entière par le virus hadopiloppsien : le pouvoir sarkozyste a déjà tenté, avec un succès partiel, d’infléchir dans le mauvais sens les textes européens, notamment en faisant remplacer les mots « autorité judiciaire » par les mots « autorité légalement compétente » (ce n’est pas du tout la même chose) dans l’amendement 46/138 du Parlement Européen. La vigilance s’impose donc à toute l’Union, d’autant plus que nous votons le mois prochain (sauf dans la périphérie bruxelloise).
Ça, moi je dis.
Voir aussi :
“Vous payez déjà la licence globale”
Et “Les droits d’auteur pour les nuls” (Eolas)
Et encore “Hadopi : sécurisation ou contrôle d’usage ?” (April)
Et ce n’est pas fini : il y a encore ceci et cela, et même ça
[1] Attention, ToR n’est pas destiné à faciliter les téléchargements massifs et clandestins, pas davantage à garantir le secret des communications, mais à assurer l’anonymat de l’internaute abusivement surveillé. La plupart des serveurs mutualisés du réseau ToR sont d’ailleurs paramétrés par leurs opérateurs bénévoles pour bloquer les ports utilisés par les réseaux P2P. Le PIF (paysage internétique français) résultant de la loi Hadopi pourrait constituer une nouvelle donne nécessitant des solutions nouvelles, du moins pour quelque temps.
[2] Compte tenu de la bande passante limitée dont je dispose, ce proxy n’est hélas accessible qu’aux visiteurs authentifiés. En cas de besoin, demander une accréditation ici.
[3] Le projet LOPPSI, qui suivra de près le projet Hadopi, montre clairement que le filtrage et la surveillance du Net sont une préoccupation majeure du gouvernement français, bien au-dessus d’un prétendu souci de protection ou de promotion de la création artistique.
[4] Mais cela risque d’être totalement contreproductif aussi bien pour la sûreté de l’État que pour la protection des droits d’auteur. Voir ici, et je ne suis pas le seul à le dire.
[5] avec un renversement de la charge de la preuve, on l’aura noté : la présomption d’innocence du droit commun est ici remplacée par une présomption de culpabilité, et le « verdict » est purement administratif ; les rédacteurs du projet de loi ont veillé en effet à priver leur cible des garanties ordinaires du droit pénal.
[6] On pourrait même les considérer comme d’opportunes diversions. Exemple désormais fameux : « Sur les logiciels… sur l’affaire des logiciels libres, évidemment les logiciels libres, quand on achète, évidemment des logiciels, par exemple le pack Microsoft (ça c’est pas du logiciel libre) : Word, Excel, Powerpoint, il y a évidemment des pare-feux, je viens de le dire, il y a des logiciels de sécurisation. Mais sur les logiciels libres vous pouvez également avoir des pare-feux, qui d’ailleurs, mais évidemment. Par exemple, nous au ministère, nous avons un logiciel libre, qui s’appelle Open Office et il y a effectivement un logiciel de sécurisation qui empêche en effet le ministère à la Culture d’avoir accès, bien sûr, et les éditeurs de logiciels libres fournissent des pare-feux, et fournissent même des pare-feux gratuits. Donc cet argument est sans fondement. Voilà ce que je voulais dire. »
[7] J’ajoute que je dispose aussi d’un équipement audio analogique/numérique de très bonne qualité, qui m’a permis plus d’une fois d’effectuer d’excellentes sauvegardes de musiques acquises légalement mais numérisées avec des verrouillages gênants et inacceptables. Je vous engage donc à conserver religieusement vos anciens matériels analogiques, ils vont devenir précieux. Le cours du Nagra va grimper…
[8] Par acquit de conscience, j’ai écrit à http://jaimelesartistes.fr/contact.aspx pour savoir si mes enregistrements radio sont légaux ou non. La réponse : pas de réponse…
[9] implication plus étroite de la CNIL, garanties judiciaires, amende ou réduction temporaire du débit en lieu et place de la coupure, contribution créative, exclusion des personnes morales et des collectivités, abandon du filtrage, etc.
[10] Christine Albanel avait déjà commis une erreur du même acabit à propos de la radio numérique ; l’hexagonalité n’est plus de mise en ces matières et Mme Albanel ne l’a toujours pas compris. Elle ne comprend d’ailleurs pas grand chose, et je ne suis pas sûr qu’elle ait conscience de l’instrumentalisation de son ministère par le pouvoir pour couvrir d’un voile pudique et culturel une entreprise de nature essentiellement policière : son incompétence facilite anéfé la manœuvre en diluant le débat.
[11] Leur force collective a été stupidement sous-estimée : les « cinq gus dans un garage » ont tout simplement fait capoter le projet, bien plus sûrement que les quinze gus sous l’escalier de l’Assemblée.